Manifestation et risques encourus
Action FFMC
L’appel à la résistance lancé par le Bureau National sera relayé par les antennes FFMC dans toute la France, à charge pour ses dernières d’organiser la mobilisation des motards sur le terrain, par des actions symboliques.
Comme à chaque sortie militante, se pose la question des responsabilités en place et des règlementations en vigueur.
Pour rappel, la question de la responsabilité des antennes a fait l’objet d’un atelier, lors des dernières JTI, et d’une fiche technique disponible sur l’extranet de la FFMC nationale.
Avant toute chose, il faut distinguer la responsabilité de l’antenne en tant que personne morale de celle du militant, personne physique.
I – La responsabilité de l’antenne
Elle pourra être recherchée en réparation des dommages que l’action menée par l’association aura causés à un tiers (responsabilité civile) ou pour sanctionner un comportement interdit par la loi (responsabilité pénale).
La responsabilité pénale de l’antenne : une situation rarissime
Depuis le 1er janvier 2006, les associations sont responsables pénalement de toutes les infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants (article 121-2 du code pénal).
Deux conditions sont exigées :
- l’infraction doit avoir été commise par une personne ayant le pouvoir de représenter l’association (statutairement ou par délégation) ;
- l’infraction doit avoir été commise pour le compte de l’association, c’est-à-dire dans le cadre de son objet statutaire.
La responsabilité pénale de l’association peut être cumulée avec la responsabilité pénale des personnes physiques qui la dirigent.
Concrètement, l’antenne sera représentée au tribunal par son coordinateur ou tout autre membre désigné parmi le conseil d’administration.
L’association étant une personne morale, elle ne peut être mise en prison.
En revanche, elle encourt systématiquement une peine d’amende (jusqu’à 5 fois le montant prévu pour les personnes physiques) et, pour les infractions les plus graves, la dissolution ou l’interdiction d’exercer son activité.
Les communes semblent actuellement promptes à porter plainte, notamment pour dégradation. L’action pénale porte alors plutôt sur les dirigeants de l’association, en tant que personne physique. Ainsi 2 membres du conseil de la FFMC 80 ont été condamnés à payer une amende pour avoir tagué un support de radar.
Mais l’action vise aussi parfois directement l’association, notamment lorsque les personnes ayant effectué les dégradations n’ont pas été clairement identifiées. La mesquinerie des édiles va loin puisque la FFMC 59 a été poursuivie pour dégradation car il restait des traces de scotch double face sur des bornes de signalisation.
La mise en cause pénale de l’organisateur s’explique essentiellement par la recherche d’une indemnisation auprès de l’Etat. L’article 92 de la loi du 7 janvier 1983 dispose en effet que l’Etat est civilement responsable des dégâts et des dommages résultant des crimes et délits commis par des attroupements.
La stratégie n’a cependant jamais payé puisqu’il reste rare que la responsabilité pénale d’une association soit retenue.
Dans 99,99 % des cas, c’est la responsabilité civile des associations qui est engagée.
A retenir :
- l’infraction doit avoir été commise par l’un des représentants légaux de l’antenne (membre du CA),
- la sanction prend la forme d’une forte amende payée à l’Etat.
La responsabilité civile de l’antenne : un contentieux à la mode
Il arrive que les actions menées créent un préjudice aux tiers. Ces derniers n’hésitent plus à mettre en jeu la responsabilité civile d’une association en raison de ses propres fautes ou de celles commises par ses membres, afin d’obtenir une indemnisation.
La responsabilité pour faute
Article 1382 et 1383 du code civil
L’antenne est responsable des dommages qu’elle a causés par son fait, par sa négligence ou son imprudence. C’est en fait des fautes commises par ses dirigeants ou ses préposés qu’elle devra répondre.
Exemple : choix et sécurisation du parcours de la manifestation, gestion du cortège par le service d’ordre, consignes de sécurité données aux manifestants, etc.
La responsabilité du fait d’autrui
Article 1384 du code civil
L’association peut également être responsable des fautes commises par des personnes dont elle doit répondre.
Est-elle alors responsable de tous les actes perpétrés par les manifestants ?
La question s’est posée à l’occasion du litige qui nous a opposé à la société d’autoroute Paris-Rhin-Rhône (SAPRR). Celle-ci réclamait à la FFMC 42000€ en réparation du préjudice commercial qu’elle a subi alors que des motards, échappés d’une manif FFMC, ont organisé un « péage gratuit ».
La responsabilité de la FFMC a été écartée au motif, notamment, que l’association n’avait pas le pouvoir de contrôler les manifestants, qui n’avaient d’ailleurs aucune autorité pour la représenter.
Pour synthétiser, la FFMC n’aurait pu être condamnée que si c’étaient les membres du Bureau National qui avaient levé les barrières de péage.
A retenir :
- La responsabilité de l’association ne pourra être engagée que pour les fautes personnelles commises par les dirigeants de l’association,
- La sanction prend la forme d’une somme d’argent versée à la victime.
II – La responsabilité du militant
Contrairement aux personnes morales, le militant sera davantage recherché sur le terrain de la responsabilité pénale. Disposant de ressources financières limitées, il fera rarement l’objet de recours en réparation, surtout si le préjudice est important. On voit mal la SAPRR réclamait 42 000 € à un particulier, ce d’autant plus que la participation à un attroupement ne doit pas être couverte par l’assurance en responsabilité civile dont chacun dispose.
C’est donc bien les comportements infractionnistes qui vont nous intéresser ici. Car certains profitent de l’anonymat offert par la foule pour se « défouler ».
Il faut donc leur rappeler que chaque manifestant est responsable de ses actes.
III – Les infractions les plus courantes
Sitting, affichage sauvage, opération escargot, tags, invasion casquée, manif improvisée sont globalement les actions les plus envisagées par les antennes.
Attention, toutes ses actions présentent un risque…
Voici une liste des infractions les plus courantes pour ce type d’opérations :
Entrave à la circulation :
Article L412-1 du code de la route
Le fait, en vue d’entraver ou de gêner la circulation, de placer ou de tenter de placer, sur une voie ouverte à la circulation publique, un objet faisant obstacle au passage des véhicules ou d’employer, ou de tenter d’employer un moyen quelconque pour y mettre obstacle, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende.
Toute personne coupable de l’une des infractions prévues au présent article encourt également la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle.
Lorsqu’un délit prévu au présent article est commis à l’aide d’un véhicule, l’immobilisation et la mise en fourrière peuvent être prescrites dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3.
Les délits prévus au présent article donnent lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire.
Exemple : en 2002, un chauffeur-routier participait, dans le cadre d’une journée d’action syndicale, à une “opération escargot” et conduisait l’un des trois véhicules de tête. Or, ceux-ci stoppèrent totalement et à plusieurs reprises le trafic. Il fut condamné à 3 mois de prison avec sursis et 1 500 euros d’amende (+ retrait de 6 points) par la Cour d’appel de Lyon.
Rébellion
Article 433-6 du code pénal
Constitue une rébellion le fait d’opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public agissant, dans l’exercice de ses fonctions, pour l’exécution des lois, des ordres de l’autorité publique, des décisions ou mandats de justice.
Seule la résistance active est punissable (s’opposer à une arrestation par exemple). La résistance passive ne constitue pas une rébellion (refus de marcher, de se coucher par terre ou de se laisser trainer par les policiers).
Article 433-7 du code pénal
La rébellion est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende.
La rébellion commise en réunion est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende.
Article 433-10 du code pénal
La provocation directe à la rébellion, manifestée soit par des cris ou des discours publics, soit par des écrits affichés ou distribués, soit par tout autre moyen de transmission de l’écrit, de la parole ou de l’image, est punie de deux mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende.
Lorsque le délit prévu à l’alinéa précédent est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables.
Attroupements
Article 431-3 du code pénal
Constitue un attroupement tout rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public susceptible de troubler l’ordre public.
Un attroupement peut être dissipé par la force publique après deux sommations de se disperser demeurées sans effet, adressées par le préfet, le sous-préfet, le maire ou l’un de ses adjoints, tout officier de police judiciaire responsable de la sécurité publique, ou tout autre officier de police judiciaire, porteurs des insignes de leur fonction.
Il est procédé à ces sommations suivant des modalités propres à informer les personnes participant à l’attroupement de l’obligation de se disperser sans délai.
Toutefois, les représentants de la force publique appelés en vue de dissiper un attroupement peuvent faire directement usage de la force si des violences ou voies de fait sont exercées contre eux ou s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent.
NB : tout rassemblement sur la voie publique ne constitue pas forcément un attroupement prohibé. Il n’y pas lieu de disperser le public si le regroupement ne porte pas atteinte à l’ordre public.
Article 431-4 du code pénal
Le fait, pour celui qui n’est pas porteur d’une arme, de continuer volontairement à participer à un attroupement après les sommations est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
L’infraction définie au premier alinéa est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende lorsque son auteur dissimule volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifié.
Article 431-5 du code pénal
Le fait de participer à un attroupement en étant porteur d’une arme est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.
Si la personne armée a continué volontairement à participer à un attroupement après les sommations, la peine est portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende.
Si la personne armée dissimule volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée, la peine est également portée à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 € d’amende.
Attention, nombreux sont les motards à posséder un couteau de poche. Pensez-à le laisser à la maison avant de sortir.
Manifestation non déclarée
Article 431-9 du code pénal
Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende le fait :
- D’avoir organisé une manifestation sur la voie publique n’ayant pas fait l’objet d’une déclaration préalable dans les conditions fixées par la loi ;
- D’avoir organisé une manifestation sur la voie publique ayant été interdite dans les conditions fixées par la loi ;
- D’avoir établi une déclaration incomplète ou inexacte de nature à tromper sur l’objet ou les conditions de la manifestation projetée.
Article 431-10 du code pénal
Le fait de participer à une manifestation ou à une réunion publique en étant porteur d’une arme est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende.
Participation à une manifestation en dissimulant son visage (port d’un casque)
Article R645-14 du code pénal
Est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe (1500€) le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation sur la voie publique, de dissimuler volontairement son visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l’ordre public.
Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux manifestations conformes aux usages locaux ou lorsque la dissimulation du visage est justifiée par un motif légitime.
Dégradation
Article 322-1 du code pénal
La destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende, sauf s’il n’en est résulté qu’un dommage léger.
Les peines passent à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré est destiné à l’utilité ou à la décoration publiques et appartient à une personne publique ou chargée d’une mission de service public.
Les peines passent à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende :
- Lorsqu’elle est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;
- Lorsqu’elle est commise par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée.
Article R635-1 du code pénal
La destruction, la dégradation ou la détérioration volontaires d’un bien appartenant à autrui dont il n’est résulté qu’un dommage léger est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe (soit 1500 €).
Les personnes coupables de la contravention prévue au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
- La suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire, cette suspension pouvant être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle ;
- Le travail d’intérêt général pour une durée de vingt à cent vingt heures.
Bombage (tag)
Article 322-1 du code pénal
Le fait de tracer des inscriptions, des signes ou des dessins, sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies publiques ou le mobilier urbain est puni de 3750 euros d’amende et d’une peine de travail d’intérêt général lorsqu’il n’en est résulté qu’un dommage léger.
L’amende passe à 7 500 euros d’amende lorsque le bien détruit, dégradé ou détérioré est destiné à l’utilité ou à la décoration publiques et appartient à une personne publique ou chargée d’une mission de service public.
Elle atteint 15 000 euros d’amende lorsque l’infraction :
- Est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;
- Lorsqu’elle est commise par une personne dissimulant volontairement en tout ou partie son visage afin de ne pas être identifiée.
Outrage
Article 433-5 du code pénal
Constituent un outrage les paroles, gestes ou menaces, (…) adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie. » L’outrage est puni d’une amende de 7500 €. Les peines sont de 6 mois de prison et de 7500 € d’amende si l’outrage vise une personne dépositaire de l’autorité publique (élus locaux, préfet, force de l’ordre, etc.).
IV – Tracts & affiches
L’affichage
Il peut se faire dans des lieux publics ou privés. Dans le premier cas, l’affichage n’est autorisé que sur les emplacements prévus à cet effet. La municipalité a l’obligation de mettre gratuitement à votre disposition des emplacements spécifiques : mur, panneau, etc.(article L581-13 du code de l’environnement). La surface disponible varie en fonction de la taille de la commune.
N’hésitez pas à demander à votre commune où se trouvent ces espaces d’affichage libre.
L’affichage dans les lieux privés est, quant à lui, autorisé sous réserve d’obtenir l’autorisation du propriétaire.
Mieux vaut éviter les impressions noires sur papier blanc, qui sont, en principe, réservées à l’administration. Il est possible d’utiliser un fond blanc lorsque les caractères ou illustrations choisis sont en couleur et que toute confusion avec les communications officielles est impossible.
Le tractage
Il ne nécessite aucune autorisation préalable. La pratique est donc totalement libre, sous réserve de ne pas créer d’entrave à la circulation ni de trouble à l’ordre public (attroupement, gêne à la libre circulation des personnes, etc.).
Le tract peut être remis de la main à la main sur la voie publique ou être distribué dans les boites aux lettres ou encore déposé dans des lieux qui accueillent du public (commerce, autres associations, …).
Les mentions obligatoires
Dans tous les cas, vos affiches et tracts doivent contenir les coordonnées de l’imprimeur. Si l’antenne édite elle-même ses documents, elle doit indiquer « imprimé par nos soins » et son numéro Sirene (si elle en a un). Son nom et ses coordonnées devront figurer dans le corps du document. Il sera également nécessaire d’inscrire « ne pas jeter sur la voie publique », pour éviter les ennuis avec la propreté de la voirie.
Enfin, si vous utilisez des photos ou des dessins, pensez au droit d’auteur ! Il faut obtenir l’autorisation du photographe ou du dessinateur et mentionner son nom sur le document (« crédit photo »).